Urgence absolue dans le nord du Mozambique – La communauté internationale ne peut détourner le regard

Share
Le nord du Mozambique est plongé dans une crise humanitaire sans précédent, alimentée par une intensification brutale du conflit dans la province de Cabo Delgado. Selon les derniers chiffres de l’ONU, cette recrudescence des violences a provoqué le déplacement forcé de plus de 100 000 personnes en l’espace de quelques semaines.

Nous, organisations de la société civile engagées aux côtés des populations du Mozambique, tirons la sonnette d’alarme face à l’aggravation catastrophique de la crise humanitaire dans la province de Cabo Delgado. Les chiffres rapportés par l’ONU sont plus qu’une statistique : ils racontent l’effondrement d’une région et la souffrance indicible de centaines de milliers d’êtres humains.

Un drame aux multiples visages :

Une ampleur inédite : Avec plus de 330 000 personnes déracinées rien qu’en 2025, cette année est, comme le souligne OCHA, la plus dramatique depuis le début du conflit en 2017. Le déplacement de plus de 100 000 personnes en quelques semaines témoigne d’une violence qui ne faiblit pas, mais s’embrase.

Un traumatisme profond : Les familles qui fuient pour la deuxième ou troisième fois, les récits de violences extrêmes, les détresses psychologiques menant à des tentatives de suicide, révèlent une crise sanitaire mentale majeure, trop souvent ignorée.

La tragédie des enfants : Que 67% des déplacés soient des enfants est un scandale. Séparés de leurs familles, exposés à l’exploitation, à la maltraitance et privés d’éducation, une génération entière est sacrifiée.

Une urgence sanitaire et alimentaire : La surpopulation dans des abrits précaires, l’apparition du choléra à Memba et Metuge, et l’impossibilité de cultiver les champs à cause de l’insécurité créent un cocktail mortel. La faim est une arme de plus dans ce conflit.

L’aide en état de siège : Le fait que seulement 40 000 personnes aient pu être atteintes avec une aide minimale, alors que les stocks sont vides après une année de cyclones, de sécheresse et de violence, est la preuve d’un système humanitaire au bord de la rupture. Cette insuffisance n’est pas une fatalité, mais le résultat d’un sous-financement chronique et d’un accès entravé.

Face à cette situation intolérable, la société civile exige une réponse à la hauteur de l’enjeu et formule des recommandations urgentes :

1. Augmentation immédiate et substantielle du financement humanitaire : Nous appelons les donateurs internationaux à combler sans délai le déficit de financement pour le plan de réponse humanitaire au Mozambique. Les vies ne peuvent attendre les prochains cycles budgétaires.

2. Protection des civils comme priorité absolue : Toutes les parties au conflit doivent respecter le droit international humanitaire. La communauté internationale doit soutenir les efforts visant à sécuriser les couloirs humanitaires et les zones civiles, en plaçant la protection des populations, et particulièrement des enfants et des femmes, au cœur des stratégies.

3. Renforcement de l’aide spécialisée : Une réponse d’urgence doit inclure un soutien psychosocial immédiat et de grande ampleur pour les survivants de violences et les personnes en détresse psychologique.

4. Garantir l’éducation et la protection de l’enfance : Des espaces sûrs pour les enfants, des programmes accélérés de réunification familiale et la mise en place d’espaces éducatifs temporaires sont des mesures de survie non négociables.

5. Anticiper les crises sanitaires : Il faut un plan d’urgence pour endiguer la menace du choléra et d’autres épidémies par la fourniture d’eau potable, d’assainissement et de soins de santé primaires dans tous les sites de déplacés.

6. Soutenir les communautés d’accueil : Les populations qui hébergent les déplacés sont à bout de force. L’aide doit les soutenir directement pour éviter un effondrement plus large du tissu social et économique.

La crise au Cabo Delgado n’est pas une «crise oubliée». Elle est une crise ignorée. L’indignation doit se transformer en action concrète. Chaque jour perdu aggrave les souffrances et compromet l’avenir de toute une région.

Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas, laisser le nord du Mozambique sombrer seul.